53
Magazine Dijon

hiver 2012 2013

 N°53
 
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02

Billet de retour
Jean Maisonnave

S’offrir la pharmacie d’un hôtel-Dieu ça c’est du luxe !

Ça me rend malade !

C’est un scoop. C’est aussi une histoire de cornecul. Je vous raconte.


Apothicairerie de bourg en bresse - apothicairerie de l'hotel-Dieu
Apothicairerie de bourg en bresse - apothicairerie de l’hotel-Dieu

L’autre jour, mon toubib m’envoie chez la spécialiste, à Cavaillon (j’habite pas très loin la moitié du temps). J’arrive, je crois m’être trompé d’adresse. Un jardin constellé de statues, de corniches, de sculptures ; des tableaux, des gravures anciennes, des statuettes, des antiquités plein l’entrée et les couloirs adjacents. Diantre, me dis-je, c’est le musée. Point d’aventure : la secrétaire m’explique que la spécialiste et son compagnon sont des passionnés d’art, d’archéologie et de tout ce qui touche à l’histoire de la médecine.

Et que vois-je en pénétrant dans son cabinet ? Outre les peintures, les gravures, la collection d’ex-voto, le crocodile taxidermisé et cent autres curiosités, que vois-je là, couvrant le mur du fond ?
Une pharmacie superbe, comme on en peut voir en certains hôtels-Dieu, Beaune, Tournus, Louhans, une sorte de spécialité bourguignonne, une pharmacie XVIIe en parfait état, avec pots de faïence et colonnes torsadées. Une rareté, plus ancienne que celle de Beaune.
Mais d’où provient ce petit trésor, m’étonnai-je ? De Saint-Jean-de-Losne me fut-il répondu.

Vous pensez bien que j’eus incontinent l’oreille dressée, tel un teckel femelle dans une truffière active. Voici l’histoire, très résumée :
Fierté de l’Hôtel-Dieu de Saint-Jean-de-Losne érigé au milieu du siècle des lumières, cette apothicairerie se retrouva - quand exactement, les avis diffèrent - mise en vente avec tout le mobilier lorsque le dit Hôtel-Dieu fut transformé en maison de retraite. Il en reste de beaux murs, mais entre les murs, plus rien ou presque. Il se trouve que j’ai appris par hasard où sont allées les boiseries. Le reste a foutu le camp un peu partout.
Quant à la précieuse pharmacie, elle fut repérée dans une salle des ventes dijonnaise par un antiquaire de L’Isle-sur-la-Sorgue. Prévenus par celui-ci, les actuels propriétaires affirment avoir sollicité les instances concernées, locales et régionales, avant de finir par la racheter eux-mêmes, faute d’avoir pu susciter le moindre intérêt. Ils assurent même s’être fait jeter ; mais le fin mot de l’histoire, je n’ai pu l’obtenir ici.