Automne 2014
N°60Royale ! Sans jeu de mots, même s’il fut un temps où ses copines l’appelaient « La Reine Christine ». Une autre époque. Christine Martin s’intéressait alors plus au rock qu’à la musique classique. Une musique qui n’adoucit pas forcément les mœurs car la fin d’été a été plutôt agitée pour la nouvelle adjointe à la culture.
Faut toujours se méfier de quelqu’un qui ne carbure qu’à l’eau de source et au double expresso, surtout dans le milieu culturel !
En bousculant les habitudes d’un orchestre qui avait mis des années à sortir de sa fosse et crevait (!) d’envie de se faire voir autant d’entendre... En écoutant les uns et les autres évoquer la situation d’un Auditorium de plus en plus ubuesque... En remettant à plat une situation qui commençait à gonfler (à tous points de vue)... En quelques semaines, Dame Christine a prouvé qu’elle était le bon choix, au sein de l’équipe quelque peu de bric et de broc constituée au lendemain des élections.
Quand vous lirez ces lignes, l’orchestre aura retrouvé sa place, si ce n’est à l’auditorium, du moins dans la vie dijonnaise. À côté des autres institutions qui doivent se partager la manne culturelle.
Fini le temps où tout devait se passer en coulisses : trois ou quatre institutions se partageaient le pactole, les directeurs montaient au créneau pour défendre leurs budgets et leurs prérogatives, et tout se passait entre gens de bonne compagnie.
C’est le même refrain que j’ai l’impression d’entendre, à chaque rentrée, de la part des artistes et artisans de la vie culturelle :
pourquoi donner autant à l’autre et pas à moi ? Le problème, jusqu’alors, restait tabou. Il aura fallu l’affaire du Ring et l’argent donné à un metteur en scène débutant afin de monter un Wagner qui ne restera pas dans les annales pour qu’on puisse enfin évoquer les choix culturels.
Christine Martin est tout sauf une grande bourgeoise dijonnaise, mais elle n’est plus, c’est certain, la représentante bon enfant, aux yeux éternellement émerveillés, qu’on a vu soutenir tous les spectacles vivants et leurs représentants, au fil des ans. Celle qu’on avait trop vite classée OFF (mot cher aux festivaliers), s’est retrouvée, du jour au lendemain, coincée entre des intermittents qu’elle soutenait et des représentants des scènes, des associations dijonnaises, constituant le IN actuel.
Faire des choix, pour elle, ce ne doit pas être de la tarte. Surtout quand ceux qu’elle aime bien en ont assez de récolter les miettes du gâteau.
Christine Martin a passé l’été à se poser pas mal de questions et le début de l’automne à les résoudre. Pour un Dominique Pitoiset qui revient poser un pied en ville tout en allant se faire voir à Annecy, il y a un Parvis-Saint-Jean qui se sent à l’étroit et aimerait bien profiter un peu plus du vieux théâtre municipal. Théâtre qui a réouvert à moitié ses portes sur un spectacle assez génial mis en scène par Lambert et interprété par Jamait dans le rôle d’un Guidoni époustoufflant. Morbide mais si vivant, un comble !
Il y a tous ceux qui voudraient se faire une place à l’ombre des grandes figures. Pour un Jamait, un Ming, un Pitoiset, d’autres sont là, qui guettent le moment propice. Christine croit en l’exemplarité des grands noms, des grandes structures, « qui devraient être généreuses, s’ouvrir aux petits ensembles, groupes ou compagnies, tirer vers le haut, toujours ». Il n’est pas incompatible d’avoir cinq grands musées institutionnels d’un côté, et de l’autre des ateliers, des galeries indépendantes... 1/4 du budget dijonnais va à la culture, à la vie dite culturelle. À la vie, telle que Christine l’entend et la voit.
Pour cela, il va falloir travailler ensemble. Les compagnies nouvelles et les anciennes, les ateliers pour les jeunes et les associations qui prennent de l’âge, comme l’ABC. Personne n’aimerait que l’ABC fasse un AVC, mais les temps changent, même les vieux n’ont plus l’âge de leurs artères. Ils veulent profiter de la vie, comme ces jeunes d’une école de commerce qui ont déclaré à Christine attendre d’un musée qu’il les « amuse ».
Et puis, reste l’essentiel : comment obtenir enfin d’avoir « une vraie image liée à Dijon ». On n’ose plus lui parler de grand festival (il en existe 100 petits !), malgré des initiatives privées plutôt bienvenues, comme l’Œno music festival. Attendons le retour de la troupe des « 26000 couverts » dans l’ancienne caserne Junot. Attendons de voir ce qui va se passer dans un Auditorium qui ne pourra plus se contenter d’être un lieu d’accueil de spectacles remarqués, ni même de créations remarquables sans lien véritable avec la ville...
La suite au prochain numéro ! ■ GB
Voir aussi :
Christine Martin, Culture Club