Automne 2014
N°60
« Bienvenue au pays des démons et des ours », ai-je pensé, en ressortant couvert d’un pull noir. Les ours avaient disparu, il restait un démon ». Celui qui parle ainsi est le flic Franck Bostik. Et le pays en question, c’est le Morvan, d’où ne nous vient ni bon vin ni bonnes gens, selon le dicton archiconnu. Et en son fond, caché sous la terre noire et les aiguilles de pins, que trouve-t-on ? Eh bien, mais la mort, comme il fallait s’y attendre. Quant au démon en question, vous découvrirez à la fin son visage, si vous consentez à vous plonger dans le second roman très réussi de Laurent Rivière, « Morvan de chien ».
Tout commence à Paris, dans le 10e arrondissement, où le corps d’une jeune femme assassinée à l’arme blanche est découvert… rue d’Alésia. La victime se nomme Laura B. Sur les lieux du crime se trouve Franck, qui fait partie de la police scientifique. On s’attend à une enquête classique, et puis soudainement le récit bifurque : par amitié pour une mère dont le fils Mathieu a disparu soudainement sans laisser de traces, Franck va se lancer dans une enquête parallèle qu’il n’a que quelques jours pour mener à bien.
Sa quête va le mener au cœur du Morvan, obscure et antique région restée longtemps coupée du monde. Le Morvan avec ses forêts profondes, sur l’ombre desquelles bute la lumière du jour, ses lieux mythiques – Bibracte, capitale des Eduens, où l’on « entend la nuit les chariots, les hommes et les chevaux courir sur les retranchements » –, ses hommes farouches.
Dans la préface signée de Claude Mesplède, que les amateurs du genre se plaisent à surnommer le « pape du polar », est soulignée la parenté de « Morvan de chien » avec les texte d’un illustre auteur de la Série Noire, Ross Mc Donald, dont le héros Lew Archer se lance souvent à la recherche du rejeton d’une famille mystérieusement disparu. On ne saurait mieux dire. Le roman de Laurent Rivière, maîtrisé de bout en bout, riche de ses personnages secondaires vivants et bien typés, se lit d’une traite. Un seul bémol : le titre, à mes yeux pas assez incitatif. Bien qu’un de ces animaux fasse effectivement partie de l’intrigue.
Mais ne vous laissez pas arrêter par ce détail. Ce polar en effet vaut le détour… qui passe par les noires forêts d’une contrée encore sauvage, elle-même incarnant l’un des personnages principaux de l’énigme. ■
« Morvan de chien »,
de Laurent Rivière,
éditions de l’Escargot Savant,
200 pages, 15 €.