Décembre 2009 Janvier Février 2010
N°41
Le type qui a écrit ça ne devait pas avoir beaucoup réfléchi. Quand c’est beau, ce n’est jamais inutile. C’était juste pour faire une belle réplique. Ça vaut aussi pour les cadeaux, les rituels, pas seulement à Noël : les amis qui se pointent avec des bougies parfumées, des poteries en céramique, des choses parfaitement inutiles et pas plus belles pour ça, même si parfois très chères. Heureusement, j’ai peu d’amis, ou alors des rapias. Un comble pour quelqu’un comme moi. Des 25 cravates reçues - j’en mets jamais- j’ai sauvé l’emballage de 23. J’ai pu en faire cadeau à 23 amis mâles. Si c’est pas de la générosité.
Revenons à Noël. Pour les enfants, c’est le bonheur, les cris devant le sapin, les souvenirs inoubliables, l’émerveillement. Pour les parents, il vaut mieux se dire que c’est le geste qui compte. Ou, pour en rester aux poncifs, que c’est l’ivresse du sentiment plutôt que le flacon en céramique qui importe.
Le cadeau le plus con et inutile, c’est pourtant enfant que je l’ai reçu, emballé dans du papier journal. Un martinet. Inutile parce que j’étais un enfant adorable ; un petit ange blond qui ne gardait que rarement la monnaie des commissions et jamais son pouce dans l’oeil de sa petite soeur ;
il m’était peut-être arrivé de mentir, pas sûr, mais c’est que j’avais déjà la vocation littéraire. Bref, rien qui puisse avérer l’utilité du cadeau. Et con parce que je n’y vis pas seulement une insupportable injustice. J’en éprouvai un tel traumatisme, une amertume si profonde et pérenne, imprimée dans une sensibilité déjà exacerbée par l’indifférence de la petite voisine, que j’en conçus une haine définitive pour l’humanité tout entière ;
en tout cas, une bonne moitié. Le drame, c’est que j’ai aussitôt planqué le martinet, et je sais plus où.
Jean Maisonnave
1 - Une housse de couette avec des Dauphins. C’est peut-être le comble du mauvais goût. Tatoué, photographié, filmé, encadré, dessiné, imprimé… le dauphin a malheureusement de beau jour devant lui !
2 - Un livre sur les décors de Noël en papier crépon. Il y a toujours un livre comme celui-là qui se cache parmi les autres cadeaux. C’est un peu le vilain petit canard de Noël, l’emballage que l’on déchire rapidement et le cadeau que l’on remballe aussi tôt avec une phrase du genre « Oh, excellent, je vais me plonger dedans pour l’année prochaine ! » Avec le secret espoir que d’ici là, tout le monde aura oublié qu’à Noël prochain votre appart sera sensé ressembler à une salle de classe de maternelle…
3 - Le CD de Romain Lamia. Il a quelque chose en lui de Michel Berger ou pas. De Balavoine, un peu mais pas trop. Et de Stanislas peut-être avec un air de Philippe Candéloro. ça vous inquiète ? Moi aussi. Pour les autres, le CD est dans les bacs et notre chanteur dijonnais préféré, sur scène du 15 au 17 Juin 2010 au Théâtre des Feuillants, à Dijon. À quand le Zénith ???
4 - Un lapin nain. Deux possibilités : il reste nain, ce qui ne l’empêchera pas de dévorer vos fils électriques, d’évacuer toute la paille de sa cage sur votre parquet tout propre, de faire de la tachycardie au moindre claquement de porte. Ou, il devient énorme, ne tient plus dans sa cage, mange de plus en plus, effraie vos enfants, mord, siffle, crie et chante du Michel Sardou.
5 - Le DVD d’Arthur. Le principe même du DVD d’humoriste, de one-man-show ou de spectacle comique est risqué. Qu’à cela ne tienne, certains en sont convaincus, c’est le cadeau qui fait hyper plaisir. Et c’est ainsi que l’on se retrouve avec un DVD génialissime « Arthur en vrai ». Déjà qu’en faux ça fait peur, là c’est sur on va faire des cauchemars.
6 - Un abonnement à la Gazette de Dijon. Ben déjà parce que c’est gratuit et que ça fait jamais plaisir lorsque quelqu’un essaie de vous refourguer un cadeau Yves Rocher, Damart ou Super U. Et puis parce que jusqu’à présent vous viviez très bien en ne lisant QUE Bing-Bang.
7 - Une boîte de mauvais chocolat. Fini les Ferreros Rocher de l’ambassadeur et les cuites au champagne, les bons chocolats ça se méritent !
Hummmmmm qu’ils sont bons ces chocolats à quoi au fait… ??? Ah, mais il y a comme une deuxième couche à l’intérieur ! L’adage fort connu « pas de bras, pas de chocolat » mérite d’être revu et corrigé en ces temps de crise par « pas de tunes, pas de chocolat ».
Signé : Emilie Jolie (Y’en a marre qu’on ne parle que des petites Cochonnes et des Chaperons rouges)
Eh oui, à cette période de l’année, tout le monde en parle du cadeau le plus ringard arrivé sous le sapin. Souvent c’est à sa belle-mère bien-aimée que l’on doit cette petite horreur.
Merci belle maman, c’est ma couleur préférée, ce caca d’oie me va parfaitement au teint…
Oh ! Un repose-cuillère en faïence avec un manche en buis véritable du marché de Haute Provence, formidable, ça manquait dans ma cuisine high-tech !
Pourquoi tant de méchanceté ? Vous avez pris son fils adoré, d’accord, mais elle n’avait qu’à garder son vieux mari si elle voulait de la compagnie, ou s’acheter un chien. Tiens ! Y penser pour Noël prochain.
Mais, loin devant, il y a le cadeau suprême, le comble de l’affreux : la couverture polaire avec des manches
Fabriquée en polaire ultra doux et ultra chaud…
Déjà au départ une polaire, c’est très moche. Affectionnés des sportifs et autres montagnards, ces habits à la cool remplacent maintenant les survêtements des laveurs de voitures et autres footeux du dimanche. Pire, certains en osent le port en ville ! Y a t-il des créateurs pour se pencher sur le problème polaire ? Nenni, pas de D&G, JPG ou M et F G en vue, c’est la banquise… Aficionado, tu resteras un tas informe, justement :
Cette couverture avec des manches vous couvre de la tête aux pieds dans un confort incroyable… C’est la burqa de quand on a froid chez soi. Pour les couleurs, vous avez le choix entre bordeaux et kaki.
Remplace les chaussettes d’hiver, la couverture et la robe de chambre…
Là, on atteint le nirvana du sexy.
Robe de chambre = mémé ; le jour où j’ai ce paquet dans les mains pour Noël, je prends rendez-vous chez mon chirurgien préféré pour une refonte totale. Tout y passe, lifting, lipo, les seins, le nez, les fesses. Pas de ça chez moi !
Et puis je m’offre un kilo d’antidépresseur pour le jour de l’an. Je ne sais pas si ça suffit un kilo.
Mais ça n’arrivera jamais, c’est de la science-fiction. Moi, j’ai cette grande chance, ma belle-mère ne me fait pas de cadeau.
Bridget P
Plus de place pour délirer après ces trois zozos, tant pis, on va faire bref. Ce que j’aimerais ? C’est qu’un éditeur me demande un vrai guide de la Bourgogne que j’aime, sans être obligé de passer par les incontournables qui nous font chaque année passer pour des gentils bébêtes, quand on se retrouve avec nos pots de moutarde et nos pains d’épices pour représenter notre région à Paris. Oui, maintenant on a Jamait qui chante Dijon en anglais (il y en a bien un qui va m’offrir ça en avant-première !) et on va aller se faire voir en Amérique, du moins les plus gentils, car les autres vont rester là. J’aurais du prendre ma carte au PS et devenir adjoint à la culture, j’aurais peut-être pu empêcher qu’on finisse cette décennie dans une merde noire, avec des spectacles qui foutent les boules et une programmation pour bobos qui n’amuse plus personne. J’aurais aimé avoir du fric et ouvrir avec Bruno (l’homme du lard, pas la grosse légume du marché) un vrai bistrot autour du marché pour manger enfin des poireaux vinaigrette qui auraient du goût et un ragoût comme personne n’ose en faire à Dijon. Le pire cadeau que vous pourriez me faire, c’est de m’annoncer qu’à la place de Zuddas, on aura l’an prochain, pour représenter la gastronomie bourguignonne, une chaîne de brasserie portant le nom du « Pape des Escargots », et obligeant tout le monde à faire un ban bourguignon au moment du dessert. On passerait à TF1 au journal de 13h, et Voo TV passerait 24h sur 24 un plagiat de « Plus belle la vie » pour nous montrer dans notre quotidien. Merci du Kdo !
Gérard Bouchu