automne 2012
N°52Gérard Bouchu
Voyage au bout du tram… ouais ! We are Dijon. Et on en est fier. Retour sur trois mois qui ont changé la face du monde, depuis notre dernier numéro.
Judith et sa contrebasse direction l’Auditorium, www.traversees-baroques.fr ; La pétillante serveuse de La Bourgogne, arrêt Place de la Rèp ; Pierre claude Jacob, plongeur, direction la piscine municipale, www.piscineolympique-dijon.fr ; Romain Hurtault, le faux chirurgien, direction le CHU ; Bouga, chasseur du dimanche, terminus campagne ; Sophie, la shoppeuse, arrêt nimporte-où au centre-ville ; James Diolot, chef du petit bouchon ; Axel Chasnel, joueur du CPHD, arrêt patinoire, www.dijonhockey.fr ; Bruno, skieur, arrêt Gare SNCF puis La gentiane Bleue ; France, ménagère arrêt Godrans les mardi, vendredi, samedi ; Lionel, au téléphone
J’adore le tram, vraiment, même si le le prend rarement. Forcément, j’habite au centre-ville. Mais j’adore le voir passer en promenant mon chien. Grâce à lui, je vois le monde autrement. J’aurais jamais cru, ainsi, que la place Darcy était sur une butte, et qu’on voyait, en allant à la gare, les collines au loin.
J’aurais jamais imaginé avoir du plaisir à traverser les Grésilles pour aller vers le Parc des Sports, et même plus loin, jusqu’au centre de Quetigny. Rigolez, mais si vous aviez entendu les réflexions des Dijonnais autour de moi, lors des journées d’inauguration, vous auriez été émus jusqu’aux larmes. Combien imaginaient qu’il y avait encore une vie, même plutôt douce au quotidien, une fois passé Carrefour, par exemple ? Certains en auraient presque fouillé dans leur sac à la recherche de papiers d’identité.
Un nouveau monde s’ouvrait à nous, dont on était les explorateurs. Avec un marché dominical, un rêve pour Dijonnais, au cœur d’une ville nouvelle qu’on ne connaissait pas, à deux pas de chez nous. Enfin, deux pas pour monter dans le tram, car il a fallu slalomer à travers un Campus tout vert, et ouvert sur la ville, puis traverser un Hôpital, après un passage près de la morgue qui en a refroidi plus d’un(e).
Plus d’un mois a passé, le rêve à fait place au tram-tram quotidien, les piétons ont appris à regarder à gauche et à droite (démarche très saine si l’on veut survivre, à Dijon) avant de traverser. Enfin, presque tous, car il y a les étourdis, ceux qui avaient l’habitude de traverser sous le pont de l’Arquebuse et ne comprennent pas pourquoi il va leur falloir faire un détour par la gare s’ils ne veulent pas se retrouver directement à l’autre bout du tram, aux Urgences.
Qu’est-ce que ce sera après le 8 décembre, quand la seconde ligne sera ouverte, qu’on pourra aller directement faire son marché dominical à Chenôve, cette fois, ou attendre l’ouverture de la future Toison d’Or…
De quoi rassurer cette mamie étonnante venue déclarer à mon épicière préférée que : « le tram, c’était pas une réussite, qu’il n’y avait personne dans certaines rames ». Forcément, elle regardait passer un tram faisant un essai à vide sur la ligne 2 !
Si seulement l’inauguration de la seconde ligne avait pu se faire fin septembre. On aurait peut-être pu fuir plus facilement l’invasion de pianos mécaniques qu’il faudra un jour placer parmi les pires plaies du siècle, à moins que des sauterelles ne nous tombent dessus le 8 décembre. J’écris Bing Bang en entendant pour la 27ème fois Lili Marlene sur l’orgue des Barbares installés face à ma fenêtre. De quoi me donner des envies de filer à Berlin retrouver nos chers Pleurants, qui terminent au Bode Museum leur tournée internationale. Eux au moins auront échappé deux ans durant aux travaux, aux cris, aux musiques en tous genres. Ils retrouveront le tombeau des Ducs. Pas le coin le plus fun de Dijon. Mais ils verront passer des touristes, ce qui devrait les réjouir…
Et si on voyait Dijon par leurs yeux : une capitale des temps modernes, qui se paye le luxe d’une mutation unique dans son histoire. Un tiers de commerçants qui changent, des terrasses qui avancent et reculent au rythme des autorisations, des rues qui mettent de l’eau dans leur vin et attendent patiemment qu’on les piétonnise. D’autres qui ont déjà un pied dans le futur, comme la Liberté, qui a mis de l’eau dans son gaz, elle, durant les travaux.
Après avoir été consacré « Monsieur Tram », André Gervais, l’adjoint aux transports, pourrait devenir « Monsieur Train-de-vie » afin de libérer le centre-ville des voitures qui le bloquent. J’ai du indiquer son chemin à une fliquette perdue loin de la Préfecture, et je passe mon temps, le soir, en sortant la chienne, à consoler ceux qui ne trouvent pas de place autour du marché. « Je tourne depuis 27 minutes, m’a dit un monsieur tout rouge ». J’ai failli lui rétorquer qu’il nous enfumait depuis pas mal de temps, mais bon.
Ils sont nombreux, comme lui, à tourner comme des phalènes autour de la République, ne pouvant se garer dans les boulevards adjacents occupés par des voitures ventouses empêchant les visiteurs de stationner à proximité des stations de tram, ce qui est idiot, bien sûr.
Bien sûr, l’idéal serait d’avoir notre super-héros à l’américaine, un héros bien à nous, un Super-Dijon, qui puisse sauver l’adolescente en détresse à une sortie de boîte, la mamie coincée entre deux rails, le commerce de proximité en chute libre…
Quel adjoint oserait se mouler dans le costume bleu du super-héros à la Superman ? On a bien une petite idée derrière la tête, avec le grand défi relevé par Dijon cet automne : le projet de Cité de la Gastronomie (on vous en parle un peu plus loin, dans les pages Restos), qui devrait voir le jour, avec ou non l’aide de l’Europe, à l’emplacement de l’ancien Hôpital Général, et à deux pas de la future ligne 2 du tram.
Un projet à la hauteur de la capitale des temps modernes qui va pouvoir profiter de son nouveau visage pour attirer de plus en plus de visiteurs. De quoi booster l’offre culturelle, déjà pléthorique. D’autant plus qu’arrive, à la tête du Parvis-Saint-Jean, Benoît Lambert, le metteur en scène assez délire de « We are la France », une pièce dont le nom nous avait déjà inspiré un numéro spécial « Super-Bourgogne » et dont l’arrivée pourrait coïncider, vous nous voyez venir, avec celle de « Super-Dijon » !
Bon voyage au fil des pages, en attendant le tram. Que vous descendiez à gauche, ou à droite, importe peu, on n’est pas « regardant », comme on dit par ici… D’autant plus que c’est vous qui nous avez « à l’œil » !
Gérard Bouchu