Printemps 2011
N°46Communiqué
Texte : PL
Photo : DR
Les climats du vignoble de Bourgogne sont candidats au patrimoine mondial de l’humanité. Objectif : inscrire à l’Unesco le terroir et le savoir-faire de la Bourgogne devenu au fil du temps une référence mondiale.
Rien à voir avec la météo, quoique… En Bourgogne le mot « climat » a une signification bien particulière : il renvoie aux parcelles de vignes soigneusement délimitées et connues sous le même nom depuis des siècles. Derrière cette notion, il faut comprendre que l’on englobe une dimension géologique, climatique, historique, culturelle et humaine. Ce n’est donc pas que du vin, ni un paysage, ni même un savoir-faire que l’on classe mais la conjugaison de toutes ces valeurs défendues par la Bourgogne depuis que les Romains ont planté de la vigne.
L’Organisation des Nations-Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) est née le 16 novembre 1945. Elle s’est fixé un objectif vaste et ambitieux : construire la paix dans l’esprit des hommes à travers l’éducation, la science, la culture et la communication. Concrètement, il s’agit de préserver des sites exceptionnels, des lieux extraordinaires et de protéger le patrimoine naturel et culturel.
Les climats sont 100 % made in Bourgogne. Cette notion est née ici, avec les moines bénédictins, au premier siècle de notre ère, puis avec les cisterciens dès le Xe siècle. À cette époque, toute la côte viticole est aux mains de l’aristocratie et des communautés religieuses. Les moines se sont creusé la tête pour faire des vins de qualité : ils ont étudié de près la vigne, mené des expériences en termes de vinification, ils ont comparé, mesuré, dégusté et sont même allés jusqu’à goûter la terre pour délimiter les parcelles ! Tout ceci a donc été fait avec une grande précision : les climats, ce sont d’abord des portions de vignoble, nées des conditions naturelles de sols, d’exposition au soleil ou aux vents. C’est ce qui explique qu’aujourd’hui, à quelques mètres près, la même appellation ne donne pas naissance au même vin.
Ça fait déjà un petit moment que ça dure… et ce n’est pas encore fini ! En moyenne, il faut attendre cinq ans pour qu’un site figure sur la liste du patrimoine mondial. Pour les climats de Bourgogne, le verdict devrait tomber en 2013, si tout se passe bien.
Les sites choisis pour figurer sur la prestigieuse liste du patrimoine mondial doivent justifier d’une « valeur universelle exceptionnelle ». En fait ces sites doivent avoir un caractère unique et authentique à l’échelle mondiale. Pour faire le tri dans les dossiers, l’Unesco a donc établi une liste de critères. Pour être sélectionné comme bien culturel, naturel ou mixte, les sites candidats doivent répondre à au moins un des dix critères.
Tout savoir sur l’Unesco : http://whc.unesco.org/fr
Le dossier est porté par les villes de Dijon, de Beaune, le Conseil général de Côte-d’Or, le Conseil régional de Bourgogne, par toutes les communes viticoles des Côtes de Nuits et de Beaune mais aussi par les regroupements professionnels (Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne, Confédération des appellations et des vignerons de Bourgogne, la fédération des négociants-éleveurs de Bourgogne…, la Chambre de Commerce et d’Industrie de Côte-d’Or). Mais la candidature des climats de Bourgogne au patrimoine mondial est orchestrée par une association présidée par Aubert de Villaine, viticulteur et co-gérant de la Romanée-Conti et par un Comité de soutien avec à sa tête Bernard Pivot.
Le périmètre englobe une étroite bande de collines et de coteaux, plus de 60 kilomètres, de Dijon aux Maranges. Cela inclut évidemment toutes les communes du tracé y compris Dijon et Beaune. Derrière les climats il y donc des vignes, des villages et des villes.
Dijon et le vin, peu de gens savent que c’est en fait une longue histoire. Sur des anciennes cartes du XIXe siècle, on redécouvre un Dijon viticole avec plus de 1200 hectares de vignes dont les célèbres Marcs d’Or, un cru très apprécié à l’époque qui a failli devenir une AOC au XXe siècle. Aujourd’hui, ce clos dijonnais a été replanté mais produit assez peu de bouteilles. Si les Ducs de Bourgogne et les riches propriétaires dijonnais ont participé à faire des vins de Bourgogne ce qu’ils sont aujourd’hui, le vignoble dijonnais a lentement disparu. La faute à l’urbanisation, la faute aussi aux propriétaires dijonnais qui se sont toujours entêtés à conserver le cépage gamay pourtant interdit par plusieurs décrets, notamment en 1395 par Philippe le Hardi, qui lui préférait le pinot noir. Dijon ne renie pas pour autant aujourd’hui son passé viticole : la vigne y est toujours présente. Il y a bien sûr le célèbre « Montre Cul », exploité par le domaine Derey. Il y a également quelques hectares de vignes à Plombières-les-Dijon, sur le plateau de la Cras. Sans oublier l’Institut de la vigne et du vin Jules Guyot ou la première Chaire Unesco « Culture et Traditions du Vins »
portée par l’Université de Bourgogne …
Pas de date de péremption ! L’inscription d’un site sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco est définitive à condition que le « plan de gestion » soit correctement appliqué et respecté. Cela peut concerner la préservation et la mise en valeur du site, la mise en place de bonnes pratiques touristiques, l’éducation des visiteurs… Quand vraiment c’est la cata, l’Unesco recale certains sites ou les redirige vers la liste des sites en péril.
L’inscription au patrimoine mondial ne veut pas dire que le site devra être figé ou « muséifié ». Être classé au patrimoine mondial n’imposera pas nécessairement des contraintes supplémentaires. En revanche, une charte territoriale signée par l’ensemble des porteurs de cette candidature sera signée le 8 avril au château du clos de Vougeot. Ce vaste « programme » intègre un plan de gestion appelant à suivre « une politique exemplaire », en vue par exemple de réduire l’usage des produits chimiques dans le vignoble, de favoriser le développement durable ou encore d’assurer la pérennité et la gestion maîtrisée du site dans toutes « ses dimensions architecturales, urbaines, paysagères et viti-vinicoles ». Ces documents permettront par exemple d’apporter une base de travail technique permettant de préciser, ce sera une première, sur quoi repose cette notion de terroir.
Oui ! En Europe on en compte déjà neuf régions classées dans laquelle la viticulture joue un rôle central : Saint-Émilion, le Val de Loire, les régions côtières italiennes de Cinque Terre, le Haut-Douro au Portugal, la vallée du Rhin en Allemagne, les vignobles de Lavaux en Suisse, le Tokaj en Hongrie, la Wachau en Autriche et l’île du Pico au Portugal.
Non ! Trois sites bourguignons figurent déjà sur la liste du patrimoine mondial : l’abbaye cistercienne de Fontenay, la basilique et la colline de Vézelay, le prieuré de la Charité-sur-Loire au titre des chemins de Saint-Jacques de Compostelle. Les climats de Bourgogne pourraient donc être le quatrième site de la région à recevoir le célèbre label.
Evidemment le label Unesco encourage le tourisme. On estime que le classement au patrimoine mondial peut engendrer une hausse de la fréquentation touristique d’au moins 20 %. Et c’est aussi l’occasion pour les Bourguignons et notamment les dijonnais de redécouvrir leur région, et un vignoble à la porte de leur ville !
Pour commencer, faites un tour sue le site de l’association www. www.climats-bourgogne.com. Vous retrouverez tout le programme des réunions d’information, des débats, et des conférences-dégustations sur le thème des climats et toutes les infos pratiques sur le comité de soutien, les bénévoles etc. L ‘association organise par ailleurs une expo itinérante « Regards partagés… », les climats vus par 3 photographes bourguignons : Jean-Louis Bernuy, Armelle et Michel Joly (jusqu’à juin 2011 au château du Clos de Vougeot. Et de juin à septembre 2011 à Nuits-Saint-Georges). Prochain grand rendez-vous : « la marche des climats », un événement grand public qui aura lieu dans le vignoble le 8 avril à la tombée de la nuit.