68
Magazine Dijon

Octobre 2016

 N°68
 
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08

par Jean-Michel Electronica

Jean-Michel Jarre pas mâle en point du tout

À 68 ans, le « Godfather » de la scène électronique française est encore vert. Son Electronica Tour passe par Dijon le samedi 26 novembre. Il ne faut rien de moins que le Zénith pour JMJ dont les shows « son et lumière » démesurés auraient du mal à rentrer dans des clubs plus modestes. Son album diptyque fait la part belle aux collaborations. Et c’est là-dessus qu’a commencé l’interview de Jean Michel (sans tiret, il y tient !) « à la cool » Jarre, dans les fauteuils du bar de l’Hôtel La Cloche.


Martin et Jean Michel Jarre
Martin et Jean Michel Jarre © DR

Electronica vous place au milieu de 40 ans de musiques électroniques. Collaborations avec de nombreux artistes : M83, Gesaffelstein, Boyz Noize, mais aussi Tangerine Dream, John Carpenter ou...Pete Townshend (des Who). Est-ce que c’est facile de faire du neuf avec du vieux ?
JMJ : Je ne me suis pas posé de question. Je suis allé instinctivement vers les gens avec lesquels j’avais envie de travailler. Ce n’était pas une démarche de marketing sinon j’aurais fait ce que je n’aime pas beaucoup : des featurings qui consistent à envoyer des fichiers à des gens que l’on a jamais rencontré ou auxquels on ne parlera jamais, plus pour faire du name dropping qu’autre chose.

Qu’est-ce qui vous rapproche et qu’est-ce qui vous éloigne de David Guetta ou Bob Sinclar ?

Rien de particulier. Ce sont des gens qui font de la musique et qui sont tout à fait respectables. D’ailleurs, je trouve tout à fait injustes les critiques qui peuvent leur être faites. Mais ces artistes, je les qualifierais beaucoup plus d’artistes « Pop ».

“David Guetta et Bob Sinclar sont des gens tout à fait respectables.Ils font de la pop en 2016”

Vous avez déclaré : « je ne préfère pas mettre ma photo sur mes pochettes d’album ». Visiblement, pour Electronica, c’est différent… ?

Je me suis dit d’Electronica : « c’est un projet qui intègre énormément de gens et qui a peut-être besoin d’être incarné ». C’était ça l’idée. En plus, puisqu’il s’agissait d’un double album, le deuxième était la vraie pochette. Quand on les enfile tous les deux, on revient à ce que j’ai toujours fait : mettre une photo au verso de l’album plutôt qu’au recto.

Jean Michel Paradoxes

Vous avez des préoccupations écolos depuis longtemps. Selon vous, « avant que ça devienne « marketable ». Le Visuel d’Oxygène de 1976 le montre. Mais, est-ce que vous avez fait le bilan carbone de vos concerts ?

Aujourd’hui, il y a une certaine arrogance à penser que l’avenir de la planète dépend de nous. Il faut plutôt savoir si notre avenir dépend de la planète. Donc prenons un peu de distance avec ça. Bien sûr, il faut trier ses poubelles, mais si on ne le fait qu’un jour sur deux, ce n’est pas non plus dramatique. Au bout d’un moment, on abîme aussi ce que nous sommes. Le vrai problème dont on ne parle pas est un problème démographique :
on est 7 milliards, la Terre est faite pour 850 millions d’habitants. C’est plutôt ça ce sur quoi il faut s’interroger plutôt que de savoir si on dépensé 10 watts de plus ou pas ou si, comme dans certains concerts, il faut venir en espadrilles ou à vélo pour être écolo correct.

En 1983, vous produisez Musique pour supermarché, à un seul exemplaire. Vous détruisez le master sous contrôle d’huissier pour protester contre l’apparition du CD qui signe, selon vous, la mort des disquaires et la vente de musique dans les grandes surfaces. Vous vous êtes déjà entendu dans un supermarché ? Ça fait quoi d’hésiter entre deux marques de pâtes et d’entendre Oxygène ?

Cela peut arriver. Mais moi, je déteste la musique d’ambiance. Dans les restaurants, je suis prêt à aller démonter les haut-parleurs. Le pire c’est aux États-Unis. Le niveau de décibels est tellement fort qu’on voit les tables, on a l’impression qu’ils sont tous en train de s’engueuler tellement ils parlent fort.

“Je déteste la musique d’ambiance”

Vous assumez complètement votre côté « variétoche ». Non pas variétés, mais variétoche ! Concept franco-français : comment le définiriez-vous ?

Je ne sais pas d’où vient cette citation [interview avec Libération, octobre 2015, NDLR]. Mais je vais vous dire : moi je la connais assez peu cette variété française. Sans jugement de valeur, je me sens assez « off ». J’ai fait quelques incursions avec des gens qui étaient des gens de variétés, et qui le sont peut-être un peu moins aujourd’hui comme Christophe [Jean Michel Jarre a écrit les paroles des « mots bleus »], Patrick Juvet [l’instrumental de où sont les femmes, c’est encore JMJ !] ou comme Françoise Hardy. Mais c’est un milieu que je connais mal, en dehors des gens que j’ai cités.

Vous êtes souvent moqué : votre musique, vos cheveux, vos choix esthétiques. Est-ce que ça vous agace ? Même pas un petit peu ? Un article de Slate du 25 mars 2010 vous définit comme le « Richard Clayderman du synthétiseur »…

Aujourd’hui, ça me prend du temps, mais ça ne me fait ni chaud ni froid. Ce sont des choses qui viennent surtout d’une minorité originaire de 3 quartiers de Paris. Je pense que tout ça, c’est un peu derrière moi, même s’il y a encore quelques opportunistes du contre-pied. On vit avec. Comme disait Aristote : « tu fais rien, tu dis rien, tu penses rien, et comme ça, tu n’as pas de problème ». À partir du moment où l’on fait des choses, c’est normal qu’on soit attaqué et critiqué par des gens qui, viscéralement, ne vont pas aimer ce que vous faites, ce que vous êtes.

 ? Vous avez 68 ans et vous avez un teint de jouvenceau. Êtes-vous un vampire ?

Oui. Je réponds Oui.


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