45
Magazine Dijon

Décembre 2010 - Janvier février mars 2011

 N°45
 
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03

Jean Maisonnave

Humeur de table La chronique du ronchon



Damned, j’ai raté la Foire ! Trop traîné dans les collines piémontaises, c’était la fête du Barolo, beau vin, mais devenu cher et dur. On est trop fragile pour attendre dix ans que le vin s’ouvre. S’il s’ouvre. Les vignerons piémontais et toscans devraient jouer plus sur le fruit, enfin je peux me tromper. A Alba, c’était le marché aux truffes blanches, les vraies (tuber magnatum). Une manifestation devenue immense, très people, foule compacte. Pas mal de camelote ou produits dérivés et de la blanche à 3000 € en moyenne. Faut aimer. Je préfère la noire mais on doit reconnaître que la concentration aromatique de la blanche est très supérieure. De toutes façons, tout ce qui tourne autour de la truffe est devenu difficilement appréciable :
trop de valeur mythique ajoutée, marché illusionniste.

truffes blanches
Avant, on avait fait le Salon du Goût à Turin. Impressionnant aussi, même si déjà on sent s’insinuer l’emprise du pognon. Immense oenothèque, des milliers de vins. Et là, qui vois-je ? Le patron de la foire gastronomique de Dijon. Normal, en fait : c’est un homme estimable, dans son entreprise, il cherche la qualité, c’est un des meilleurs, alors il en a marre de vendre du mètre carré et du graillon. Il était sûrement là pour s’inspirer, pour redonner à notre Foire toute sa dignité. Réjouissons-nous sans retenue. Le dernier qui a essayé, et réussi, c’est Jean-François Bazin, alors président de la Région, en transformant les mortels Etats Généraux de la gastronomie en instance de réflexion nationale. C’est comme ça.

Arrivé ici, j’ouvre le journal : « La gastronomie française au patrimoine de l’humanité » ;
ça claque bien mais c’est faux, c’est le repas gastronomique à la française qui a été classé et ce n’est pas la même chose. On parle là d’une pratique sociale, plus périphériquement des contenus. C’est à peu près comme si tu disais :
la tulipe a été inscrite au patrimoine alors qu’il s’agirait du verre tulipe. C’est un véritable fourvoiement métonymique, dirait le linguiste. C’est la cagade dirait mon voisin Mimile dont la soupe au pistou mériterait d’être inscrite au patrimoine.
Quand même. C’est l’histoire de la cuisine française qui se voit ainsi célébrée. Et ce n’est sûrement pas le moment d’y cracher, dans la soupe.


Dans mon ermitage, je ne reçois pas le journal mais j’ai la télé. « Masterchefs » sur TF1. Des cuisiniers amateurs se font casser par un trio de bourrins professionnels dont un critique. Grosso modo, c’est ça ; un cirque façon « On achève bien les chevaux » ; solennité, condescendance, élimination, balancée avec ce qu’il faut d’indulgence rédemptrice. C’est un jeu mais dans l’esprit, c’est le contraire de la cuisine qui est a priori spontanéité, aménité, partage… Dans la foulée, je tombe sur une mère perruche qui veut marier son nazillon, puis sur un débile profond jacassant avec une folle perdue. Que des gagnants à TF1, au bout de cinq minutes, c’est la nausée.
Ce qui pourrait suffire à justifier la présence de cette télé dans une critique gastronomique : elle est à gerber.

Jean Maisonnave


 
 

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