Automne 2014
N°60Foire de Dijon
Dijon fête la gastronomie depuis des décennies, au point qu’on avait fini par ne plus prendre au sérieux la réputation d’une ville qui s’était endormie sur ses escargots, sa moutarde, son pain d’épices... Réclames d’hier, affiches d’aujourd’hui, photos souvenir et projets pour demain, on passe la revue d’un demi-siècle au service du ventre. De quoi se bidonner !
Faut dire qu’on est un peu facile à manier, les hommes, non ? Depuis l’enfance on se fait avoir à coup de sucreries, de petits plats, de trucs parfois à peine bouffables que la mémoire transforme en miracles culinaires.
La foire des années 60, ceux d’entre nous qui s’en rappellent en ont des souvenirs éblouis : premières crêpes avec ou sans Grand-Marnier, selon l’âge, pêche à la ligne pour rapporter des poissons en chocolat, bouffes sur un coin de toile cirée dans un stand, découvertes de mondes lointains...
Comme c’étaient les parents qui payaient, on trouvait tout bon, tout gratuit. Deux décennies plus tard, on trouva ça ringard. Quelques décennies encore et on vous dira que c’est l’invention du siècle (siècle dernier, faut pas pousser !). La preuve, tout ce qui a révolutionné notre mode de vie, de la cocotte SEB aux actus des Géo Trouve tout du concours Lépine, tout ça était présent à la foire, suffisait de voir.
Dans vingt ans, les plus jeunes d’entre vous iront à leur tour raconter, émus, leur découverte d’une nouvelle-nouvelle cuisine à base d’insectes séchés, de produits bio, de vin naturel. Ils raconteront à leur progéniture (qui n’en aura rien à braire) les mésaventures de la Cité de la Gastronomie, née à l’emplacement d’un ancien hôpital, à deux pas d’une ligne de tramway qui les emmenait faire le marché le week-end à Chenôve ou aux Grésilles, avant qu’on ait réussi enfin à installer un marché des producteurs sous les Halles le dimanche.
Avec un Escargoton pour faire vendre les blancs de la région. Et c’est un ancien maire, un temps ministre du Travail, qui en lancerait la mode, dans un verre ballon (forcément !) tout comme son plus célèbre prédécesseur, un certain chanoine Kir, l’avait fait en donnant son nom à un mélange qui allait être connu du monde entier.
Un ballon (de blanc de la Cras) avec quelques escargots, tout le monde va adorer. Il y aura foule autour des halles pour l’apéro, si Dijon réussit, comme Bruxelles et d’autres villes célèbres, à instaurer ce rendez-vous festif où toutes les classes se retrouvent pour boire, rigoler, discuter verre à la main, jusqu’à la tombée du jour, un panier rempli de produits et de vins bio posé à côté.
Car on est une ville du vin, désormais, avec ces vendanges citoyennes qui vont devenir un rendez-vous bon enfant incontournable de la rentrée, sur le plateau de la Cras. Juste après l’apéro dinatoire donné au Jardin de l’Arquebuse par les chefs de la région. Sympa, tout ça.
Cette année, c’est le Portugal et les vins du Douro que vous pourrez (re)découvrir du 31 octobre au 11 novembre dans le cadre la Foire, avant d’aller tester le menu du jour proposé par un des grands chefs invités du Quartier des Saveurs. Après Vinidivio, rendez-vous avec Vino Bravo (mais où vont-ils trouver ces noms !) le 5 décembre, manifestation qui fait « Le Point » sur la question, en présence de Charles Berling et de quelques stars incontournables de la dive bouteille. On devrait apprendre au même moment qui seront les acteurs engagés financièrement dans l’aventure de la Cité de la Gastronomie. Vino divino, comme aurait dit le chanoine (dans une version non expurgée, il se serait contenté d’un « vin blanc, mon cul ! »).