Printemps 2018
N°74Germain Arfeux
On a demandé à l’enfant du pays –un grand gosse trentenaire à la fois timide et déluré qu’on vous a présenté dans ces pages – de nous livrer ses bonnes adresses. Du coup, ça surprend un peu, ça change, surtout. Faut dire qu’on en était resté pour Semur, sa ville natale, aux Minimes, un bistrot tenu par la sœur du Chabrot, un phénomène moustachu (on parle de Christian Bouy, pas de la sœur) qu’on fréquentait déjà du temps du Cheval Blanc du regretté Bob Faugenet.
Germain aurait pu aussi nous indiquer Le Bistrot de Louise, la seule adresse à Venarey-les-Laumes qu’il respecte. Faut dire que dans son bouquin, que vous irez forcément acheter, il donne comme conseil aux habitants de Venarey de raser leur bled, trop moche, trop triste. Il a raison, faut rigoler un peu, chez les Gaulois. Bibracte a réussi son coup, avec son resto qui fait dans l’authentique gaulois reconstitué, les fermières de Flavigny n’ont qu’à bien se tenir. Sinon, vous avez le café des Anis (non, pas des amis, même si on les aime bien). Mais on ne va pas mettre tout l’Auxois à table, et puis on a dit que ce serait subjectif. Michelin a failli embaucher Germain Arfeux, pour son prochain guide. Comme il n’a pas son permis, ils se sont dégonflés. Nous, on s’en fiche, il ne prend que des TER ou des bus, ou il marche, ça réduit les frais. Par contre, il boit bien, on prévoira un budget spécial pour cet été. ■ GB
2 avenue de la gare. Venarey-les-Laumes
Avec ses murs de tôle blanche, avec sa vue sur la gare, sur les chemins de fer, sur les trains qui passent et qui freinent et qui vous vrillent les tympans, avec le voisinage du grand parking du supermarché de la ville, et son va-et-vient incessant de bagnoles vrombissantes, son air pollué, ses étendues de goudron, ses panneaux publicitaires, avec toute la vie laumoise qui tourne autour de lui, l’Ancêtre sait vous plonger comme aucun autre bar dans le cœur de cette ville. Sa terrasse vous place aux premières loges de la laideur du monde moderne. Nul ne peut quitter ce lieu et rester entièrement progressiste. Je n’ai pas été très tendre, dans mon livre, à l’égard de la ville des Laumes, néanmoins, je dois reconnaître que la dernière fois que je me suis trouvé à la terrasse de ce café, l’amabilité du patron et la générosité des clients, m’ont ému, et m’ont rendu, in fine, cette ville touchante, par bien des aspects (qui n’ont aucun rapport avec l’esthétique, cela va de soi). Qu’on la rase néanmoins !
4 rue de l’ancienne comédie. Semur-en-Auxois
Il y a quelques années à peine, Semur comptait près d’une dizaine de cafés et bistrots, et des plus chouettes. Puis, en raison d’incendies, de départs à la retraite, de faillites, leur nombre s’est réduit comme peau de chagrin.Les doigts d’un manchot suffiraient aujourd’hui à les dénombrer tous. Mais parfois à quelque chose malheur est bon, et comme les bars sont devenus moins nombreux, ils sont désormais plus fréquentés, donc plus vivants, donc plus conviviaux. Le Lion est sans conteste le meilleur de la ville.Toute la population de la ville s’y rend, à des horaires divers. Le déjeuner y est familial.
A l’heure de l’apéro, ce sont les vieux du coin qui viennent boire leur canon chez Ismaël. Le soir, ce sont les jeunes qui viennent s’abreuver de bières et de cocktails, autour d’une partie de billard. La bonne humeur s’y tartine sur une bonne tranche de vie semuroise.
Tous les jours, sauf lundi, de 9h à 23 h
(2 h vendredi et samedi)
place du marché. Châteauneuf-en-Auxois
A chaque fois que je vais visiter le château de Philippe Pot, je m’arrête là-bas, dans cette bonne vieille auberge, pour me taper une bonne glace (en été) ou pour m’envoyer un chocolat chaud (en hiver), et je m’en suis toujours trouvé satisfait, malgré la présence des touristes.
4 rue Févret. Semur-en-Auxois
Lorsque j’étais enfant, la pizza était encore un plat exotique, inconnu des Mandubiens. L’entr’act fut vraisemblablement l’une des premières pizzérias à ouvrir dans le pays. Je m’y rendis, intrigué, lorsque j’avais 5 ans, et depuis je n’ai pas cessé d’y retourner. Il y a parfois un peu de monde, c’est vrai (non sans raison) mais quand on vient tôt, on peut espérer dénicher une place dans la grotte, tout au fond. C’est là qu’on trouve les meilleures tables ! Et une pizza à l’époisses, une !
Tél : 03 80 96 60 10
13 rue Févret. Semur-en-Auxois
C’est l’un des restaurants les plus anciens de Semur, et sans doute celui où la nourriture est la plus copieuse, et la plus bourguignonne. La spécialité, ici, c’est l’époisses, qu’on répand en abondance sur presque chacun des plats qu’on y propose : salade à l’époisses, entrecôte à l’époisses, tartiflette à l’époisses… on trouve même du tiramisu à l’époisses ! Surprenant mais extra. Les tarifs ont un peu augmenté, malheureusement, mais ça reste un excellent endroit pour se remplir généreusement la panse et s’empiffrer comme un goret. Saint Vernier, patron des vignerons, priez pour notre foie !
Tél : 03 80 97 32 96. Ouvert tous les jours. Formule 12,90 € le midi ; menus 20-26 €.
place des Marronniers. Marigny-le-Cahouet
Rien n’a changé, ou presque, dans ce petit café de village, depuis plus de 60 ans. Ni le décor, ni les boissons, ni la clientèle. En 1960, l’endroit devait sembler banal. En 2018, il est exceptionnel. Un lieu enchanteur tenu par un patron un poil désenchanté, qui voudrait bien vendre, mais même l’annonce chez Pernaut sur TF1 n’a rien donné. C’est le dernier commerce du village. Passez par l’épicerie, si le café est fermé.
place Pierre et Marie Curie. Pouilly-en-Auxois
C’est là dans cette auberge que les vieux loups de mer et les bourgeois de Pouilly viennent se retrouver, bien au chaud, au coin du feu, à l’abri des tempêtes, pour déguster des bons plats bourguignons. C’est à la fois un havre de tranquillité et une salle de banquet où l’on peut se repaître en paix et siroter en toute sérénité.
Tél : 03 80 90 88 23
2 rue Gautrin. Flavigny-sur-Ozerain
Après avoir longtemps vécu dans nos anciennes colonies d’Extrême-Orient, le propriétaire de ce restaurant en est revenu avec une indigène (qui est née dans le pays, au sens strict, précisons, qu’on ne nous taxe pas de racisme, encore !), qu’il a épousée, et avec quelques savoureuses recettes de cuisine, que lui ont enseignées les meilleurs popotiers du delta du Mékong. Ce n’est pas tous les jours qu’il nous est donné de se faire servir des rouleaux de printemps sous une voûte bourguignonne. Au Garum, cet exotisme incongru devient une ragoutante réalité.
Tél : 03 73 67 00 01
12 quai Philippe Bouhey. Montbard
Tout au bout du bout du monde, dans l’inconnu total, au plus noir de l’obscurité du monde, on trouve ce bar crépusculaire, morne, improbable, désarmant d’humanité. C’est l’endroit parfait pour assister à la fin du monde et attendre, impassible, la venue de la mort.
Je n’y ai jamais dormi, mais je crois que je me sentirais moins perdu et moins dépaysé sur la planète Neptune que dans une chambre de l’hôtel Neptune.
(NDLR : ne comptez pas sur nous pour vous en dire plus !)
7 route royale. Pont-Royal
C’est ici que les ouvriers du coin, les carriers, les cantonniers, les manœuvres, viennent grailler pendant leur pause repas, et ce n’est pas triste. Ça cause fort, ça boit, ça rit à gorges déployées. Les blagues fusent. La bonne humeur déborde. Les apprentis boivent leur coup, comme les autres. Le menu coûte une bouchée de pain (autour de 15 € quand même, le pain a augmenté !) et l’assiette est bien remplie, autant que les verres. On a l’impression d’y vivre une scène de Fellini tournée au beau milieu de l’Auxois (NDLR : Germain a un côté Claude Rich dans les Tontons Flingueurs, c’est étonnant qu’il n’ait pas plutôt cité ce film). ■
Tél : 03 80 64 18 25
■ Germain Arfeux