Octobre 2016
N°68Nick Hornby dans « Funny Girl », évoque une créature solaire, qui a le don de faire naître le bonheur autour d’elle, et qui sera payée en retour. Avec « California Girls », Simon Liberati nous délivre un son de cloche bien différent. Ce son en effet est un glas. Car si les sixties furent apolliniennes dans leur ensemble, le dionysiaque prit le meilleur sur la fin.
Nous sommes en 1969, à Happy Valley, près d’Hollywood. Charles Manson, un avorton de 1,57 m, se rêve en pop star. Mais les choses ne se passent pas comme prévu ; très déçu, Manson libère alors les puissances des ténèbres : le gourou persuade ses « California girls », trois jeunes hippies fanatisées, accompagnées d’un garçon, de se rendre dans une riche villa de Beverly Hills, et de massacrer les cinq occupants. Et cela pour des raisons qui échapperont toujours à des esprits sains. Parmi les victimes se trouve Sharon Stone, épouse de Roman Polanski, enceinte de huit mois. Le roman nous conte leur martyre heure par heure, minute par minute. Certains passages sont difficilement supportables. Mais Liberati a choisi de s’appuyer sur les faits, rien que les faits.
Le livre de Simon Liberati me rappelle le chef-d’œuvre de Truman Capote, « De sang froid ». Car « California Girls » est le journal d’une psychose. Ces meurtres terribles et gratuits ont été générés par la folie d’un homme qui a su vampiriser l’esprit de ce que l’on a appelé après les faits la « famille Manson », trois filles d’une vingtaine d’années qui ont, sous son influence, commis l’impensable.
Le récit est glaçant, et Liberati le mène dans un style à la fois familier et distancé, qui souligne encore plus les atrocités commises. Mais, par-delà la mort et le sang, la sidération ressentie naît d’une question simple : qu’est-ce qui a poussé ces jeunes filles à dire oui au diable ? On attend encore la réponse, de nombreuses fois esquissée, mais jamais totalement probante.
Quoi qu’il en soit, nul doute que les vierges folles de Satan ont, par leurs actes déments, gagné leur place en enfer… ■