54
Magazine Dijon

Printemps 2013

 N°54
 
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05

Bienvenue au pays de la Gastromagie

Un prince, un duc, d’accortes cuisinières, de bons artisans, quelques gueux amateurs de cuisine pas trop dégueu… il faut de tout pour faire une Cité de la gastronomie ! En route vers le futur festin (pardon, destin) de la ville de Dijon.


gastromagie

Il était une fois… comme dans tout bon conte de fée, une cité qui vivait peinarde, à l’ombre de la tour Philippe le Bon, et dans le souvenir de l’époque bénie de sa Foire à l’ancienne, de ses stands débordant de victuailles auxquelles on pouvait goûter sans débourser un sou, ou si peu. À l’époque, on trouvait encore en ville des gargotes pas très chères pour se remplir la panse le midi et des tables nappées pour les bourgeois en goguette, sans parler des guinguettes au bord de l’eau et des dînettes dans des lieux où il faisait bon s’encanailler.
Déjà, en ce temps là, on se méfiait des ânes de Beaune et de leurs ruades traîtresses. L’expression est ancienne, et marquait la supériorité de la cite des ducs envers la capitale des vins de Bourgogne. Il serait temps de changer tout ça, une fois, comme disent nos amis belges.

Dijon vole... Beaune attaque...

Aujourd’hui, Dijon et Beaune se sont déjà rapprochées… en laissant couler du béton sur de bons terrains qui auraient pu accueillir des vignes, dans les années 60-70. Maintenant, les deux pleurent parce que les méchants de l’Unesco, insensibles à tout pot de vin (ceci dit au cas où certains y auraient pensé), leur ont préféré une grotte oubliée et des volcans même pas actifs pour l’inscription au patrimoine de l’humanité.
Puisqu’on nous promet une cité mouvante, capable de voler sur son tapis magique entre Dijon, Tours et Rungis, on pourrait créer un arrêt-tapis à Beaune, pour profiter du paysage et faire des provisions de bouche tout à la fois (voir la chronique de Jean Maisonnave sur le sujet).
Beaune en a plus que Dijon, faut rattraper ça. On parle des étoiles Michelin bien sûr. L’heure n’est plus aux polémiques concernant les choix d’un guide qui doit aujourd’hui répondre lui aussi à des objectifs économiques et entretenir un réseau, ne serait-ce que sur Internet.

La guerre des étoiles n’aura pas lieu !

Lorsque William Frachot reçut sa première étoile au Chapeau Rouge, il y a dix ans, nombre de ses confrères lui ont reproché les choix du Michelin de l’époque, comme s’il était responsable de la perte de la troisième étoile d’un Loiseau à Saulieu ou de celle de Jean-Pierre Billoux à Dijon. Aujourd’hui, Meneau, Loiseau, Lameloise, Lorrain, Billoux restent des noms toujours au firmament dans le ciel bourguignon, mais nombre de tables méconnues le seraient restées, en Bourgogne du sud notamment, si le bonhomme Michelin ne les avait pas dénichées.
Des tables que les Bourguignons ignorent, d’ailleurs. Deux étoilés nouveaux à Tournus, Meulien et Quartier Gourmand, bel hommage à un autre cité naguère petite capitale de la gastronomie, faudrait pas l’oublier. Et un à Beaune, Le Clos du Cèdre. Les Dijonnais qui ont trop attendu pour aller goûter l’an dernier la cuisine du jeune chef japonais vont pouvoir aller tester celle de son successeur ! Et oui, certaines étoiles filent vite.
On en oublie un troisième Dijonnais, Hervé Rodriguez, parti chercher fortune et gloire loin de sa ville natale et qui vient d’obtenir son étoile, à Boulogne-Billancourt, avec MaSa (voir plus loin).

il faut de tout pour bâtir une cité…

Des étoiles dans le ciel, une cité de la gastronomie volante, il serait temps de revenir sur terre, direz-vous. D’autant qu’il n’y aurait jamais de rêve possible sans les milliers d’artisans, de restaurateurs et de petits producteurs qui croient encore à ce qu’ils font. Sans eux, une cité de la gastronomie serait un leurre de plus, qu’on agiterait à la tête des touristes asiatiques pour les faire consommer ; quoique, les touristes asiatiques, on ne leur fait plus prendre du pâté de foie pour du foie gras et de l’aligoté pour du meursault. Ce sont eux qui nous rachètent, alors, respect !
Nous aussi, on veut y croire, à cette cité de la gastronomie, d’autant que la malédiction lancée par une méchante fée sur Dijon semble là-aussi être levée. Jetez un œil sur les pages suivantes, et sur vos derniers Bing Bang : des femmes en cuisine continuent de préparer des petits plats de saison et de ménage ; des chefs jeunes ouvrent des tables de qualité ; des bistrotiers font plaisir le midi à des centaines de travailleurs plus ou moins pressés en offrant du sincère, du goûteux, du sérieux. Nul besoin, comme certains, de prétendre : « ici, tout est fait maison ». Avec toutes les poubelles remplies des sachets plastiques et des cartons ayant contenu la base du « fait maison », mieux vaut rester modeste.

Les Tontons Flingueurs ont la patate

La magie de la cuisine, c’est autre chose que de transformer un bloc surgelé, où le bœuf - et même le cheval - a disparu depuis longtemps, en un hachis Parmentier maison. Nul besoin d’utiliser des produits de luxe, Jean-Guillaume Dufour l’a bien compris, d’où son succès. Qui ? De quel chapeau sort il, celui-là ? Inconnu au Michelin, n’existe pas.
Jean-Gui est un Dijonnais qui a créé la Cuisine des Tontons, à Paris. Plusieurs restos, où il font bon s’attabler, et un bouquin qui sort ce printemps, sur une cuisine qu’on aime tous, et qui rend hommage au film mythique de Georges Lautner, Les Tontons Flingueurs. Cuisine du casse-croûte, du produit vrai, arrosé parfois de boissons d’homme traficotées, mais la betterave, la patate, c’est un produit noble, même si ça gâche un peu le goût du whisky parfois.

Dans une ville menant une politique de gauche, il est important de rendre parfois hommage à tous ces gueux au sens noble, si l’on peut dire, qui font de la cuisine pas dégueu. Tout le monde ne pas s’offrir de notes de frais (princières) dans les grands restaurants !

■ Gérard Bouchu


 
 

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